Projet Collectif Sciences Po 2005 : Mariage Homosexuel et homoparentalité
 
Compte-rendu d’entretien
Jérôme Besnard, journaliste.

Après des études de droit et de philosophie, Jérôme Besnard s’est tourné vers le journalisme. Il est également chargé d’enseignements en droit à l’ISCPA.

Estimez-vous que sur le thème du mariage homosexuel et de l’homoparentalité, le droit est en retard sur la société ?

Le droit doit-il toujours s’aligner sur la société ? La question est essentielle. Elle recoupe un vieux débat philosophique : le droit est-il donné à l’homme ou posé par lui ? Existe-t-il un droit naturel ou le seul droit véritable est il celui édicté par la volonté du législateur ? Est-ce la vérité ou l’autorité qui fait le droit ? Le débat existe depuis l’Antiquité. Je penche pour ma part pour l’école qui d’Aristote à Michel Villey conçoit le droit comme gisant dans la nature des choses, celle du « jusnaturalisme classique ». Dès lors la famille, considérée comme communauté naturelle, a pour fondement l’hétérosexualité, condition naturelle de la reproduction.
Le droit peut-être soit une protection soit un avantage. Si toute personne, à quelque minorité qu’elle appartienne à le droit au respect de son identité ou de son orientation sexuelle, en tant que personne, elle ne saurait exiger de la société des avantages (le mariage, l’adoption) lié à l’existence d’un fait social naturel : la famille.
Accorder à deux personnes du même sexe le droit de se marier peut créer de graves antécédents dans nôtre société : en effet comment refuser dès lors la polygamie, qui est un fait social également existant dans nôtre pays ?

Même chose pour l’homoparentalité : le fait qu’il existe des enfants élevés par des couples homosexuels implique-t-il de permettre à deux personnes de même sexe d’exercer l’autorité parentale ? Evidemment non si l’on se place du point de vue du droit naturel : tout enfant ayant un père et une mère biologiques, et donc naturel, il ne saurait logiquement avoir deux pères ou deux mères sur le plan juridique.
C’est bien à un choix de civilisation que nous avons à faire entre un héritage structurant issu d’Athènes, Rome et Jérusalem d’un côté et un matérialisme désirant de l’autre.

Les homosexuels peuvent-ils et devraient-ils être reconnus comme une minorité nationale (équivalent d’un CFCM par exemple) ?

Par minorité nationale, il faut là aussi entendre communauté naturelle, c’est dire ensemble cohérent historiquement et culturellement. Je ne pense pas que ces conditions soient remplies en ce qui concerne la communauté homosexuelle. On peut tout à fait lire Marcel Proust ou Henri de Montherlant sans être homosexuel. La communauté homosexuelle relève en fait d’un phénomène plus global : le communautarisme qui comme sont nom et son suffixe l’indiquent relève d’une pure volonté et non d’une donnée historique ou politique. Que les Basques, les Bretons, les Marocains, les Juifs ou les Turcs se voient accorder telle ou telle reconnaissance politique en France n’est nullement gênant, voir souhaitable. J’ai plus de mal à percevoir l’unité d’une communauté des musulmans de France. Je n’en voit nulle trace autre que médiatique concernant les homosexuels : beaucoup d’entre eux ne se reconnaissent pas dans les stéréotypes de la « communauté gay ».