Projet Collectif Sciences Po 2005 : Mariage Homosexuel et homoparentalité
 

Patrick Festy & Marie Digoix
Same-sex couples, same-sex partnerships and same-sex marriages : a focus on cross-national differentials

Cette publication représente les actes d’une conférence organisée à Stockhom le 25 et 26 septembre 2003 par l’INED (Institut National d’Etudes Démographiques). Elle regroupe donc en plus de 300 pages les interventions d’un certain nombre de conférenciers sur le thème « Same-sex couples, same-sex partnerships and homosexual marriages ». Ces interventions abordent différents champs, aussi bien le droit que la sociologie ou l’anthropologie mais ceci dans une perspective de comparaison et de mise en perspective des situations des différents pays développés. C’est à ce titre que les expériences réalisées notamment en matière politique et juridique par plusieurs pays d’Europe occupent une place certaine dans les actes en question.

La perspective de départ est que, depuis 1989, 9 pays européens ont donné aux couples homosexuels la possibilité de faire enregistrer leur union par un représentant de l’Etat. Aussi, ce processus amorcé en 1989 au Danemark, inclut-il la reconnaissance de droits tout comme la spécification de devoirs. Amorcé il y a de cela une quinzaine d’année, ce processus peut être analysé avec un recul suffisant, les intervenants dressant à la fois un bilan (celui des droits accordés dans ces 9 Etats) et mettant en avant les bases d’une réflexion et d’une évolution future. Cette conférence cherche ainsi un expliquer, en se focalisant sur les couples de même sexe, les raisons qui poussent les membres d’une société à se marier et partant ce que cette reconnaissance légale et publique implique pour eux. C’est ainsi la question même du rapport société / individus qui est posé au travers de l’institution sociale du mariage.

Mais cette étude se limite à l’étude dudit phénomène dans le cas précis des couples homosexuels. Les interactions sociales qu’implique le processus d’enregistrement et de mariage peuvent s’analyser à travers plusieurs disciplines : le droit (quelles différences de statuts, droits et obligations existent entre les couples mariés ou non, enregistrés civilement ou non ?), la démographie (quelle type de population fait le choix d’une telle reconnaissance ?), la sociologie (quels milieux sociaux et quelles institutions entraînent le passage d’une absence de reconnaissance à une forme d’union légale, la franchissement du fossé non mariés – mariés ?) et l’anthropologie (en quoi les couples homosexuels différent-ils de couples hétérosexuels ?).

Cette conférence vise, à travers les différentes interventions compilées dans cette publication à présenter une analyse transnationale. Ainsi, il est possible de voir si les unions sont plus nombreuses dans tel ou tel Etat, et se cela s’accompagne d’une corrélation avec le nombre de couples de même sexe. De même, une telle méthode doit permettre de mettre en lumière les forces au travail, et ainsi les conséquences de celle-ci sur la structuration d’une société.

Ce colloque s’articule autour de 5 thèmes majeurs : l’adoption de la loi et l’évolution du droit, de la relation naissante au mariage, les étapes juridiques comme source d’égalité, la question de l’identité sexuelle et de sa construction et enfin les facteurs statistiques et démographiques.

En ce qui est de la relation homosexuelle, cette étude met en lumière la grande diversité des modes de vie. Cela concerne aussi bien la diversité / l’exclusivité des partenaires, la cohabitation ou l’absence de cohabitation, la reconnaissance publique / la conduite privée. La faiblesse de l’engagement est lui aussi mis en avant dans la cadre de l’étude des modes de vie homosexuels. L’absence de légitimité et de reconnaissance sociale peut contribuer à expliquer la fragilité de la relation homosexuelle. Mais il faut reconnaître que la volonté de rester fidèle à la liberté propre à la vie gay peut l’expliquer tout autant. On observerait donc, à travers le mariage, une sorte de renoncement aux particularismes de la vie homosexuelle ouverte au profit d’une reproduction des pratiques hétérosexuelles établies. Cette étude vise à analyser l’évolution sociologique, culturelle et comportementale qu’a entraîné ce changement juridique. Multidisciplinaire, cette étude cherche aussi, bien entendu, à prendre en compte les changements sociétaux ou culturelles qui ont accompagné cette évolution législative (car sans elles, la loi serait comme vide).

Afin d’analyser les différents facteurs qui interfèrent dans le processus social du « coming ou », il est nécessaire d’identifier le rôle des Eglises et des religions, celui du Sida, celui des associations gays et lesbiennes… L’étude minutieuse de la symbolique attachée au contenu de la loi montre l’ambivalence qui existe en la matière. Cela explique aussi pourquoi une loi ne peut pas à elle seule favoriser la reconnaissance sociale de pratiques divergeant de celles de la majorité. Ce phénomène est particulièrement notable lorsque les individus ont l’habitude d’ajuster leur comportement à cette norme. L’impact des lois autorisant l’adoption par des homosexuels en Hollande ou en Suède devrait aussi être étudié en comparaison avec les chiffres observés dans les pays d’ayant pas adopté ce type de loi.

Cette publication s’intéresse aussi à un certain nombre de phénomènes quantitatifs, sources de comparaisons entre les Etats. La proportion de personnes susceptibles de vivre une relation de couple de type homosexuel (à distinguer de la pratique de l’acte homosexuel) permet de dresser un tableau qualitatif du phénomène de l’union homosexuelle légale. Ceci passe par la comparaison entre le nombre d’unions enregistrées (mariage, pacs…) et le nombre de couple de même sexe. Les intervenants déplorent en majorité d’absence de données fiables concernant la proportion d’homosexuels au sein de la population des pays concernés, tout comme le manque de données brutes portant sur le nombre de couples homosexuels (comparables aux statistiques sur les mariages, divorces, naissances, décès).

De plus, comme le notent certains, la pratique sexuelle n’est pas figée, ceci si signifiant que l’idée même d’identité sexuelle (hétéro/homo/bisexuelle) présente des limites évidentes. Aussi, les enquêtes sur l’orientation sexuelle des individus butent-elles sur ce type de problème. Par conséquent, c’est l’idée même de quantification et donc de comparaison qui devient alors difficile (à partir de quand doit-on être considéré comme homosexuel ?). Les données statistiques étant par ailleurs construites sur des critères spécifiques dans chaque pays, cela rend les perspectives comparées peu scientifiques.

Pour autant, le phénomène des couples de même sexe, du partenariat entre individus du même sexe et du mariage homosexuel peut être appréhendé de manière globale au sein de pays accordant une reconnaissance juridique aux unions homosexuelles. En effet, pour que ces personnes puissent obtenir reconnaissance de leur couple, elles doivent ne pas être mariées selon la forme traditionnelle du mariage, d’autre part elles doivent être majeure. Ceci définit une population « potentielle ». On peut tenter de d’obtenir une idée plus juste en comparant par classe d’âge le nombre de personnes recensées et le nombre d’unions homosexuelles. On a alors un indicateur correct du poids de ce comportement social. Dans ce cas, une étude transnationale peut plus facilement être envisagée. On peut affiner les critères en fonction de l’âge ou du sexe, on obtient alors des données assez fiables.

Cette conférence, à travers les différentes interventions relatives aux sujets définis plus haut, permet de montrer les profondes disparités qui existent entre les Etats, alors même que tous ont adopté des législations favorables à la communauté homosexuelle. En corrélation directe avec le phénomène de l’union, l’étude des séparations est instructive. Elle constitue souvent une sorte de négatif des raisons qui ont poussé deux homosexuels à vouloir bénéficier d’une reconnaissance légale de leur relation.

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